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9 août 2014

[Écriture - 28] Ne jamais miner l'intérêt du lecteur

La dernière des choses à faire dans une histoire est de miner l'intérêt du lecteur. Comme votre histoire ne réunira pas les suffrages de toutes les catégories de lecteurs, il faut tout d'abord se faire une idée de votre lectorat. C'est aussi la raison pour laquelle les écrivains collectionnent les pseudos lorsqu'ils veulent écrire "quelque chose d'autre" et qu'ils soupçonnent leur lectorat actuel de ne pas adhérer à ce genre ou ces idées qui tranchent avec ce que leur auteur leur propose d’habitude.

Pour ce faire, il est donc essentiel de respecter certaines règles :

[1] Si vous avez un lectorat et vous changez de style, posez-vous la question du pseudo : ce genre et ces idées peuvent-elles être acceptées par la majeure partie de mon lectorat actuel ? Si non, alors il vaudrait mieux employer un autre pseudo.

[2] Si vous avez un avis tranché et catégorique, à contre-courant de certaines idées, c’est bien car vous affirmez vos prises de position, cela peut cependant représenter un écueil à votre carrière, à vos relations, voire vous attirer des ennuis juridiques (par exemple si votre ouvrage fait l’objet d’un procès et est jugé comme conforme à l’apologie de la haine), …

Dans ce cas, c’est à vous de juger, encore plus si vous choisissez l’autoédition où personne ne viendra à priori « sanctionner » votre démarche d’édition.

[3] Entraîner votre lecteur dans une histoire spaghetti où beaucoup est jeté sur la table et peu semble trouver sa fin : rien de tel pour voir votre livre alimenter les poubelles et la colère des lecteurs.

[4] Proposer à un lecteur une histoire que vous jugez non intéressante : une fois l’histoire écrite, n’envisagez pas la possibilité d’avouer : « oui, j’ai écrit cette histoire alimentaire en quelques semaines et je la trouve franchement mauvaise ». Collectionner les histoires c’est bien – pour ceux qui écrivent vite – les discréditer par la suite serait un aveu dommageable.

[5] Proposer des chapitres très inégaux. Un lecteur prend un rythme dans une histoire. Proposer un chapitre de 20 pages puis un de 2 puis un de 20 puis un de 5 montre un découpage fragile et une faiblesse dans votre projet – sauf si les quantités de pages, lignes, mots sont dosées pour représenter quelque chose, mais ce n’est pas la panacée des histoires (une idée à explorer ?).

[6] Tromper votre lecteur : tromper un lecteur est un art fait de bons dosages. Cependant, ne révéler les informations crutiales qu'à la fin et donc avouer au lecteur "je vous ai bien eu car vous n'aviez aucune chance de deviner" fera de votre histoire un navet avéré dans le meilleur des cas.

[7] Proposer des personnages tellement complémentaires qu’ils se répondent dans un dialogue comme s’il s’agissait du monologue de n’importe lequel d’entre eux. Le conflit est la règle, il doit toujours régner, c’est la loi action/réaction : si tous les personnages sont en phase, il n’y a pas à proprement parler d’action dans leurs « interactions » et la réaction sera quasi nulle (donc l’intérêt pour la découverte).

[8] Toujours tout faire passer à travers son héros. Le héros est un médium puissant de la découverte. Son interaction avec le monde passe cependant souvent par l’action des personnages secondaires, les propos du narrateur, les insertions (bulletin météo). Faire passer l’entière découverte du monde par les seuls sens du héros priverait la lecture de perspectives et lasserait rapidement.

Nota : les histoires faisant intervenir des correspondances contiennent au moins deux protagonistes. Les lettres à Milena de Franz Kafka ne sont pas dénuées d’intérêt mais « toujours lire » Kafka peut être vite lassant.

[9] Attention avec l’humour : certains traits d’humour ne sont pas adaptés à votre histoire. Si faire se casser la figure à un homme sur une flaque visqueuse – surtout s’il avait tout d’un méchant – peut attirer le sourire du genre « Et toc ! », employer cette même cascade avec un invalide risque fort de vous attirer les foudres de certaines associations, ne parlons même pas de l’effet produit si vous spécifiez certains critères de croyance ou d’appartenance ethnique.

[10] À propos d’appartenance ethnique : vous pouvez faire intervenir de la mixité dans votre histoire, ce ne sera que plus divers, plus vrai aussi. Si vous n’avez pour personnages que des africains du Bénin pratiquant le vaudou, le lecteur ne se demandera pas où se trouve le chinois ou l’indien, mais il risquera de juger votre conformisme. Là encore, c’est à vous de juger ce qui se prête le mieux à votre récit.

[11] Même remarque à propos de religion. Écrire un livre sur le fondamentalisme chrétien du 21èm  siècle peut être intéressant mais il attirera les foudres si le sujet n’est pas traité d’un point de vue objectif. Certains auteurs vous exhorteraient ici à trancher mais encore une fois, c’est à vous de juger.

[12] Toujours garder à l’esprit votre « devoir moral ». Si vous écrivez des ouvrages sur la violence et la pornographie, tout est pratiquement possible et votre livre sera annoté comme il se doit « pour adultes, contenant des scènes pouvant choquer ». Si le message en filigrane de votre histoire est qu’il faut aller poser des bombes dans toutes les cabines téléphoniques à pièce (une croyance sectaire avérée, … certainement) votre morale en prendra un coup le jour où il n’y aura plus de cabines à pièces et que vos lecteurs vous enverront des menaces pour tromperie.

-> C’est du « grand n’importe quoi » bien entendu, mais vous avez saisi l’idée.

[X] Voilà, il y a beaucoup d'écueils à éviter, ces derniers font certainement partie de ceux qu'il vous faudra avoir à l'oeil.

CONCLUSION

Entre devoir moral, analyse du lectorat et analyse structurelle de vos écrits il y a de quoi faire … et pourtant, chacune de vos histoires sera peu ou prou concernée par cela … une solution pour remédier aux doutes : au moindre doute, faites lire à des proches et demandez-leur leur avis (sans leur avoir au préalable dit le pourquoi de l’entreprise). S’ils relèvent le point qui vous gênait, qui plus est dans le mauvais sens, il y a des chances qu’il vous faille rectifier le tir.

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