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28 juillet 2014

Ecrire une histoire 16 - Faire de vos scènes une nouvelle

[Unité et contexte]

Les scènes ou bien les chapitres (si plusieurs scènes entrent en compte dans un chapitre) constituent une unité de contexte de l'histoire.

En tant que telle, une unité se doit d'être cohérente: les égoûts ne sentent pas bon, les métros sont généralement pleins (donc c'est intéressant pour générer de l'angoisse dans certains quartiers à certaines heures s'ils ne le sont pas), une déception amoureuse n'est pas une explosion de joie, la perte d'un ami est une affaire sérieuse, un troll qui fait la course en sac c'est plus marrant que navrant, etc ...

De manière idéale une unité doit être traitée comme une nouvelle à part entière (dixit entre autres Bernard Werber, voir Atelier ecriture pour une bonne introduction à beaucoup de choses).

Avant de montrer comment y arriver, passons par la case "se plaindre":

[1] Plus facile à dire qu'à faire

[2] N'importe quoi : le chapitre 36 de mon histoire, une nouvelle ? Et le contexte de l'histoire qui est sensé être connu d'avance, j'en fais quoi ?

[3] Ca veut dire qu'il faut une structure narrative interne au chapitre avec événement déclencheur, ... et solution ?

Voilà, les questions sont nombreuses et on mettrait facilement les auteurs qui proposent ce genre de chose au bûcher. Avec un peu d'analyse cependant, on se rend compte que "faire de chaque unité une nouvelle" n'est pas une obligation en soi, mais une direction pour toujours garder à l'esprit que (prenez-vous le pour dit, ce sont des règles d'or):

[A] Une unité doit nous apprendre quelque chose (si on n'apprend rien, autant jeter!)

[B] Une unité arrive avec son contexte (les unités précédentes). Alors justement, pour des raisons de symétrie, elle se doit d'enrichir le contexte, d'apporter une solution à des conflits précédents (on appelle cela "faire avancer l'intrigue") mais se doit AUSSI d'apporter des questionnements nouveaux.

[C] L'unité doit être en accord avec son contexte psychologique. Il faut donc se poser la question avant toute écriture: où se trouve mon contexte psychologique, en ai-je plusieurs (je reviens sur ce point en détails plus bas), quel degré d'approche ou de liberté ai-je par rapport à lui.

[D] L'unité a - tout autant que le reste des articulations d'une histoire - une structure interne. Cette structure reflète le contenu narratif, elle est guidée par le contenu (Exemples: avec trois hommes dans un bateau on a souvent plus de dialogues que de description. Avec un superman qui fonce contre l'astéroide destructeur de l'humanité, on a moins de dialogues, plus de fascination et plus de crises cardiaques au banc des physiciens).

Si la prise en compte de [A], [B] et [D] est plutôt triviale et permet d'échapper un tant soit peu au "remplissage" pur et simple (en plus, c'est dommage de "remplir" lorsqu'on a toujours trop à écrire), [C] est un peu plus difficile à appréhender.

[Contexte psychologique de l'unité]

Alors qu'est-ce que ce "contexte" ? Pour faire court et bien: c'est l'élément ou les éléments de référence de l'unité qui guident "l'esprit" de l'écriture de l'unité.

Exemple: si vous êtes en bateau en mer, il y a de la houle, le contexte est "la mer". Dans le métro, les gens sont serrés comme des harengs en caque, le contexte est "la sensation d'être pris dans un étau". Lors d'une énumération pour compresser les lieux et moyens de transport du personnage, le contexte est "le mouvement". Lors d'une séparation douloureuse, le contexte peut être "le sentiment de débarras chez l'un et le sentiment d'abandon chez l'autre". Lorsqu'un grimpeur est sur sa parroi, le contexte est "la précision et la lutte contre la gravité ou encore le dépassement de soi ou encore la course contre la montre s'il faut aller sauver quelqu'un ...".

Donc, en fonction de ce contexte, l'écriture va changer. On n'écrit pas un dialogue en taxi sur la 5èm comme on l'écrirait sur une plage de sable après 3 rhums-coco. On n'écrit pas une description de saut dans le vide avec pour contexte "un désespéré", comme on sauterait dans le vide pour un apprentissage de base-jump. S'il y a du jazz dans une unité, pourquoi ne pas l'utiliser comme élément fondateur de la rythmique ... à propos, quand on dit que le contexte influence l'écriture, on veut dire quoi par là ?

Voilà donc le point le plus sensible : un contexte influence "toute" l'écriture de l'unité, à savoir (imaginez une course poursuite en parcourant cette liste):

- son rythme

- son vocabulaire

- la structure de ses phrases

- les pensées des personnages, leur manière d'agir

- la relation sensible des personnages ou de la narration avec l'environnement (voir le post sur l'empire des sens) ou le but à atteindre

- la manière dont la fin s'organise (dans le contexte d'une course poursuite, la fin de l'unité se termine par exemple par l'annonce d'un accident "Le conducteur entra dans la zone de travaux. Il freina. Trop tard. La volvo plongeait déjà dans la fosse." et ainsi on ne sait pas ce qui se passe et il faut lire le prochain chapitre pour connaître l'état des dégâts)

A ceux qui disent : les auteurs ne pensent pas à tout cela lorsqu'ils écrivent, je répondrai franchement "si". Si certains ne le font pas c'est certainement que leur écriture s'en passe globalement, ... mais on peut nourrir de sérieux doutes à ce sujet. C'est avec l'expérience que cette "alchimie", ce "bon dosage" s'obtient rapidement. Mais, sachez-le, c'est toujours beaucoup de travail et ce n'est jamais parfait. À chacun de trouver sa satisfaction sur ce point. Certains auteurs écrivent plus de 30 fois la même page, d'autres se contentent du premier jet et de quelques ratures. Toujours est-il qu'entre une page travaillée et un premier jet il y a généralement une différence, cette "petite" différence qui sépare les bons écrits des mauvais. Ce n'est cependant que mon humble avis sur la question.

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